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Napoléon III, protecteur des sciences et de l’innovation



Le chemin tracé par l’Empereur devait être opérationnel et fort utile à son neveu qui, dans le même état d’esprit, associait progrès social et développement des sciences expérimentales. Un encouragement certes officiel mais freiné par le manque de moyens des laboratoires, ce que révèlera notamment l’Exposition universelle de 1867.


La confession de Napoléon Ier à Arago en dit long sur son ambition scientifique : « Si je n’étais pas devenu général en chef […], je me serais jeté dans l’étude des sciences exactes. J’aurais fait mon chemin dans la route des Galilée et des Newton. Et puisque j’ai réussi dans mes grandes entreprises, je me serais distingué par des travaux scientifiques. J’aurais laissé le souvenir de belles découvertes. » Bonaparte était persuadé que les savants devaient jouer un rôle majeur dans la vie politique et il a placé quelques-uns d’entre eux aux postes les plus élevés de la société. Napoléon III marchera sur ses traces dans ce domaine.


Beaucoup de chercheurs sont des élus ou sont nommés sénateurs en guise de récompense. Jamais le monde politique français n’a été aussi au fait des derniers progrès de la science. Certes, le premier essai fut un échec. Le 21 brumaire, Laplace nommé ministre de l’Intérieur est révoqué par le Premier consul qui écrit de lui : « Géomètre de première catégorie, Laplace s’est montré un administrateur plus que médiocre ; dès son premier travail […] nous nous étions trompés. Laplace […] cherchait des subtilités de partout, il avait des idées problématiques […] il portait l’esprit de l’infiniment petit jusque dans l’administration. » Mais Napoléon Ier a su nommer de grands serviteurs de l’État parmi les meilleurs scientifiques, comme Fourcroy et Chaptal.


Un vent de modernisation se lève sur la France

C’est l’Empire libéral qui donne le départ de ces innovations et découvertes qui feront date à partir de 1860. Ce point de départ des recherches fondamentales et d’une activité scientifique intense, ouvre une ère nouvelle pour les savants dont les moyens matériels demeurent pourtant très faibles ce que dénoncera avec courage Louis Pasteur. De nombreuses découvertes scientifiques et des savants de talents vont permettre des avancées exceptionnelles.

Les progrès enregistrés intéressent la plupart des disciplines : sciences descriptives, anatomie, zoologie, botanique, paléontologie, embryologie, physiologie. La méthode expérimentale prévaut et s’applique progressivement à toutes les sciences de la vie, balayant les autres écoles. Par quel miracle, toutes ces sciences subsistent et collaborent entre elles ? Claude Bernard parle, à ce sujet, de « connaissances enchevêtrées et solidaires dans leur évolution ».

La réussite de la recherche pour ce dernier nécessite le génie et des moyens de travail adéquats pour assurer l’évolution des disciplines et leur développement. Un discours bien ancré chez les membres de l’Académie des Sciences.


Ces pensionnaires d’élite de l’Académie des Sciences

La plupart des scientifiques qui ont marqué et illustré leur époque par leurs compétences et leurs recherches ont siégé à l’Académie des sciences, institution créée en 1666.

En premier lieu, Louis Pasteur (1822-1895) s’affiche comme un partisan inconditionnel de Napoléon III (voir encadré). En 1862, il est primé par l’Académie des sciences pour ses travaux sur la génération spontanée qui heurte ses convictions religieuses concernant l’existence divine.


Jean-Baptiste Dumas (1800-1884), chimiste et ministre de l’agriculture (1850-1851), est l’un des plus brillants savants que la France ait connu dans son domaine. Son nom figure parmi les soixante-douze noms de savants inscrits sur la Tour Eiffel. Membre de l’Académie française et de l’Académie des sciences, sénateur, il est l’auteur de nombreux traités de chimie qui font autorité.


Marcellin Berthelot (1827-1907), chimiste et politicien républicain, est un humaniste comme l’atteste son ouvrage Science et Morale. La science, selon lui, doit profiter à la société et améliorer la condition humaine. L’interdisciplinarité est nécessaire à la connaissance approfondie et à l’exploitation scientifique de chaque discipline. Pour lui, l’observation et l’expérimentation à la généralisation fondent la science positive. Comme le développe le philosophe Ferdinand Buisson dans l’article « Berthelot » extrait du Nouveau dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire « pour Berthelot […], en dehors de la science, il n’y a pas de vraie philosophie ». Il distingue la « science positive » et la « science idéale ». La première établit les faits ainsi que les relations immédiates qui les unissent, en s’aidant de l’observation et de l’expérimentation. Ces relations deviennent des termes que peuvent unir, sous le contrôle de l’expérience, des relations plus générales, comme autant de chaînes que d’autres chaînes relient. La science positive a beau étendre, multiplier les relations ou lois qu’elle embrasse, elle ne perd jamais le contact avec le réel, mais « demeure en conformité avec lui ».Berthelot défend une philosophie « qui n’assigne aucune borne au champ de l’investigation scientifique. Le progrès scientifique relativise les théories présentes […] qui paraîtront chimériques aux hommes de l’avenir ».


L’œuvre scientifique de Claude Bernard (1813-1878) pourrait se résumer à l’une de ses citations : « Le microbe n’est rien, c’est le terrain qui est tout. » En érigeant la démarche expérimentale comme méthode scientifique, Claude Bernard a conquis par ses nombreuses découvertes, les titres les plus prestigieux de son époque. Membre de nombreuses académies françaises et étrangères dont l’Académie des sciences (1854), il est nommé sénateur (1869). Sa carrière est rythmée par les échecs et le succès de ses travaux scientifiques. Il crée en 1850 le concept d’homéostasie (1), fondement de la physiologie moderne. Philosophe des sciences et épistémologie, sa méthode expérimentale se décline en : observation, hypothèse, expérience, résultat. On lui doit aussi le nom de syndrome de Claude Bernard-Hamer (affectation neurologique affectant l’œil). Jugés à ses débuts par ses pairs comme trop moderniste dans son approche de la recherche médicale, les travaux de Claude Bernard ont conquis le monde médical en dépoussiérant ses théories. Sous la poussée de la recherche, des théories deviennent – et c’est heureux – caduques. À titre d’exemple, les adeptes de la phrénologie estiment que la forme du crâne détermine la personnalité de quelqu’un. D’autres défendent la supériorité de certaines populations par rapport à d’autres, cautionnant ainsi la colonisation.


Antoine d’Abbadie, astronome, cartographe et explorateur, s’est lié d’amitié avec le prince Louis-Napoléon lors de leur voyage en Amérique du sud en 1836. En novembre 1836, François Arago l’envoie au Brésil pour étudier le magnétisme terrestre avec des instruments de mesure de l’Académie des sciences. « Si j’arrive au pouvoir, lui dit un jour Louis-Napoléon, ce que vous me demandez, sera accordé d’avance. » Le prince devint empereur, mais Antoine d’Abbadie oublie la faveur promise. L’Empereur rencontre un jour son ancien compagnon et la lui rappelle. Antoine d’Abbadie répond : « Sire, je construis un château près d’Hendaye. Si vous daignez à votre prochain voyage à Biarritz, faire quelques kilomètres, je serais très honoré de vous voir poser la dernière pierre de ma demeure. » L’Empereur promet. Cet échange datant de 1870, Napoléon III ne retourne plus jamais à Biarritz. Voilà pourquoi la dernière pierre manque au château d’Abbadia.


Michel Chasles (1793-1880), polytechnicien et brillant mathématicien, entre à l’Académie des Sciences en 1851. Il passe à la postérité grâce à la relation de Chasles et au fameux théorème qui porte son nom, bien connu de nos collégiens. Sa renommée dépasse les frontières. Le 15 juin 1854, il devient membre étranger de la Royal Society qui lui décerne la médaille Copley en 1865. Un collègue anglais a pu le qualifier « d’Empereur de la géométrie ».

La « vitrine » des expositions internationales de 1855 et de 1867

Le rôle de l’Exposition internationale de 1867 en matière scientifique se veut volontariste mais plusieurs obstacles se révèleront difficiles à franchir. Précurseur de la sociologie, sénateur et réformateur social, Frédéric Le Play (1806-1882) est son commissaire général. Dans un des nombreux rapports remis à Napoléon III, il annonce des documents présentant les progrès accomplis dans les sciences mathématiques, physiques et naturelles depuis vingt ans. Ces rapports sont déposés à l’Exposition universelle. Ils sont accompagnés par les résultats des missions scientifiques et des recherches archéologiques accomplies sous les auspices du ministère.


Selon les objectifs de ses promoteurs, l’Exposition de 1867 doit servir de « caisse de résonance » à la science et à ses applications. Pour ce faire, une commission scientifique voit le jour. Elle est composée du zoologiste et anthropologue Gardois d’Armand de Quatrefages, Prunier Bey et Édouard Lartet (anthropologie et ethnologie), Texier, du très éclectique Léon de Rosny (anthropologue, linguiste, ethnologue, nipponologue) son secrétaire et M. de Bellecombre.

En octobre 1866, les rapporteurs cités ci-dessus dans un document remis à Le Play se déclarent sur « les principales races humaines qui pourraient accompagner à l’exposition universelle les produits des diverses régions du globe ». Leur objectif est de présenter les caractéristiques physiques et culturelles auquel s’oppose l’Impératrice au nom de principes moraux : « On ne peut exposer des hommes comme des chevaux », déclare-t-elle, ce qui vaut condamnation de l’initiative.


Les inventions et les recherches scientifiques les plus notables

Sous le règne de Napoléon III, la France connaît de nombreuses avancées scientifiques notables même si elle peut regretter de ne pas être à la hauteur de ses concurrents anglo-saxons, faute de moyens financiers suffisants.


Parmi les inventions les plus marquantes, en 1862, Louis Pasteur découvre la pasteurisation, qui constitue un progrès pour les produits alimentaires et leur conservation. Le brevet déposé le 11 avril 1865 par le scientifique jurassien doit paradoxalement une grande part à la viticulture. À l’origine, ce sont les maladies des vignes qui retiennent l’attention et les recherches de Pasteur. Il répond à la commande de Napoléon III auprès duquel les vignerons s’inquiètent de voir leur production compromise par des maladies méconnues. Comment peuvent-ils honorer leurs exportations stimulées par des accords commerciaux ? Louis Pasteur s’intéresse aux ferments alcooliques. Napoléon III le désigne pour se pencher sur le problème des maladies du vin. Le chercheur élève la température de ce vin entre 55°C et 60°C. Cette température et le manque d’oxygène, éliminent les germes pathogènes. Autre avantage, le vin et son bouquet ne s’altèrent pas. La pasteurisation vient de naître. 


En 1867, le physicien et néanmoins astronome Léon Foucault (1819-1868) démontre la rotation de la Terre grâce à son pendule. Il se fait connaître pour son expérience démontrant la rotation de la Terre autour de son axe, il détermine la vitesse de la lumière et invente le gyroscope. En 1869, le chimiste Marcellin Berthelot découvre la synthèse de l’ammoniac.


Le Verrier, créateur de la météorologie moderne

Urbain Le Verrier succède à François Arago le 30 janvier 1854 au poste de directeur de l’Observatoire de Paris. Il entreprend une réorganisation plutôt sévère de son institution: les observateurs sont payés quinze centimes à l’étoile observée, une surveillance accrue des travailleurs est mise en place. La productivité de l’organisme s’accroit : trois cent six étoiles fondamentales sont répertoriées.

Malgré ses protections politiques, ses colères indisposent son personnel et le… pouvoir. Pétitions et de nombreuses démissions (une soixantaine d’astronomes de l’Observatoire de Paris) se succèdent. Démis de ses fonctions en 1870 par décret impérial, il occupe à nouveau en 1873 le poste de directeur de l’Observatoire, et ce, jusqu’à sa mort dans les locaux de son service le 23 septembre 1877.


Directeur de l’Observatoire de Paris, il a en charge un service météorologique. Il crée en 1854, à la demande de Napoléon III, un réseau de vingt-quatre stations météorologiques sur le territoire français, destiné à prévenir les tempêtes. Dès 1863, la première prévision météorologique à vingt-quatre heures est réalisée. Les premiers bulletins météorologiques quotidiens sont publiés… La météorologie moderne accomplit ses premiers pas...


Inspecteur général de l’enseignement supérieur pour les sciences, il organise la réforme de la « bifurcation des études » avec le ministre de l’Instruction Hippolyte Fortoul (la section scientifique devient distincte de la section littéraire à partir de la classe de quatrième).  La Royal Astronomical Society le distingue en 1876 pour ses mémoires sur les planètes gazeuses Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune.

Napoléon III s’est toujours montré soucieux d’être informé des dernières inventions et du suivi des recherches de son temps. Pour lui, le progrès technique est lié aux résultats des travaux de recherche qu’il soutient. Il a su nouer durant son règne, un rapport privilégié avec les savants en fréquentant les conférences et en s’associant aux expériences données le plus souvent aux Tuileries.

Certains chercheurs (Pasteur, Ferdinand de Lesseps) reçoivent une aide significative de la part de l’administration impériale. Ainsi, Ferdinand de Lesseps, diplomate et homme d’affaires, doué d’un certain sens des relations publiques, bénéficie de l’appui inconditionnel de l’Empereur pour la percée du canal de Suez (1859-1869). On raconte que l’Empereur s’endette même pour sauver de la faillite la Compagnie de Lesseps, créée en 1859. On parle à l’époque d’une somme de 50 000 francs dédiée à cette action.

Visionnaire, l’Empereur néglige l’opposition manifestée au projet de Lesseps par la Turquie et l’Égypte. Il finance par l’emprunt public et l’État, des expéditions coûteuses, crée des prix spécifiques pour chercheurs.


Comme déjà rappelé, les expositions universelles de 1855 et de 1867 servent à promouvoir les travaux scientifiques de certains chercheurs. Ainsi, l’Empereur permet le financement des travaux d’Alphonse Beau de Rochas portant sur le moteur technique à quatre temps. Il commande par ailleurs, une étude complète sur l’Egypte (antiquités, histoire nationale, géographie et l’état actuel du pays).

Alphonse Beau, dit Beau de Rochas (1815-1893) est un ingénieur français de grands travaux, lauréat de l’Académie des Sciences. Il pose le premier câble télégraphique sous-marin. Il s’intéresse à l’hydrographie, au transport ferroviaire et fluvial, ou au franchissement de la Manche par un tunnel immergé. Thermodynamicien, il décrit en 1862 un cycle à quatre temps, qui le fera reconnaître comme l’inventeur du moteur à quatre temps. Il définira par la suite certains principes du moteur à réaction, dont il avait prévu les utilisations possibles.

À l’instar de son oncle, Napoléon III a largement soutenu la science pendant son règne avec les moyens mis à sa disposition plus limités qu’à l’époque du Premier Empire. Un soutien fait de principes, mais aussi financier. Les savants faute d’être bien payés parviennent à faire financer des projets de recherche. Les chercheurs peuvent bénéficier de prix très généreux, dispensés par l’Institut qui regroupe nos cinq Académies.


La pression de la concurrence anglo-saxonne

En Angleterre, venant en appui à l’essor de l’industrialisation, la science fait des avancées majeures dans les domaines de la physique, de la chimie et de la biologie. Par ailleurs, les Britanniques ont créé plusieurs institutions scientifiques telles que la Royal Society et le British Museum.


La Royal Society, établie à Londres depuis sa création en 1660, a pour objet l’amélioration des connaissances naturelles destinée à la promotion des sciences. De très nombreux savants y contribuent. Isaac Newton y présenta sa théorie de l’optique, et en devint plus tard le président. Par sa devise « ne croire personne sur parole », la Royal Society entend établir la vérité dans le domaine scientifique en se fondant que sur l’expérience. Au xixe siècle, un système de subventions parlementaires permet à la Société d’aider au développement scientifique. La Société alloue près de 42 millions de livres sterling chaque année à partir de subventions gouvernementales, de dons et de legs.


Le British Museum est un musée de l’histoire et de la culture humaine, situé dans le quartier de Bloomsbury à Londres. Ses collections (sept millions d’objets) illustrent l’histoire humaine de ses débuts à aujourd’hui.


Pendant l’époque victorienne, Charles Darwin publie en 1859 De l’origine des espèces, ouvrage majeur qui explique comment les nouvelles espèces apparaissent. De grands progrès sont enregistrés en géologie et en paléontologie, ainsi qu’en génie civil, avec des ingénieurs tels qu’Isambard Kingdom Brunel (premiers bateaux en fer propulsés par hélice). Aux États-Unis, la science connait un essor considérable pendant le xixe siècle avec des recherches majeures dans les domaines de la physique, de la chimie siècle et de la biologie.


Les Américains ont créé plusieurs institutions scientifiques telles que l’Académie nationale des sciences et le Smithsonian Institution. L’Académie nationale des sciences est une institution des États-Unis dont les membres conseillent la nation en science, en technologie et en médecine. C’est le président Abraham Lincoln (1809-1865) qui signe, le 3 mars 1863, l’acte de naissance de la National Academy of Sciences et nomme ses cinquante premiers membres. Son acte de création précise : « L’Académie doit, à la demande de n’importe quel département du gouvernement, examiner, étudier, expérimenter et publier sur n’importe quel sujet des sciences, […], mais l’Académie ne recevra aucune compensation d’aucune sorte pour les services rendus au gouvernement des États-Unis. »


Évolution oblige, la NAS compte aujourd’hui 2 400 membres et 500 membres internationaux nommés à vie dont 190 ont reçu un prix Nobel. Être élu constitue l’un des plus grands honneurs pour un scientifique américain. La NAS fait partie du Conseil international pour la science. L’Académie se réunit annuellement à Washington et fait paraître son journal Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS). 3 600 publications scientifiques figurent sur son site internet.


Avec l’Académie américaine d’ingénierie (NAE), l’Académie nationale de médecine (IOM) et le Conseil national de la recherche (NRC), la NAS fait partie des Académies nationales des sciences, d’ingénierie et de médecine.


Créée en 1846, la Smithsonian Institution est une institution de recherche scientifique. Elle développe ses vocations éditoriales, muséographiques, pédagogiques et éducatives. Elle est associée à dix-neuf musées et neuf centres. Par testament datant de 1826, le chercheur britannique Smithson établit qu’en l’absence de filiation de son neveu, Henry James Hungerford, sa fortune (100 000 livres sterling) serait attribuée « aux États-Unis d’Amérique pour fonder The Smithsonian Institution, favorisant l’accroissement et la diffusion du savoir pour tous les hommes ». En 1835, le président Andrew Jackson informe le Congrès de cette donation qui s’élève à 500 000 dollars.


En 1846, un apport de l’État américain permet la création de la Smithsonian Institution alors que Smithson est inconnu aux États-Unis et n’a aucune relation avec les scientifiques américains. Né à Paris, il fréquentait Oxford l’Ashmolean Museum et portait un intérêt à l’instruction publique et à la démocratie.


Le Congrès publie une loi le 10 août 1846 permettant au président James Knox Polk de créer l’institution sous forme d’un partenariat public-privé. Celle-ci se positionne comme la vitrine des expéditions scientifiques et comme gardienne des trésors nationaux comme en témoignent différentes expéditions dont l’Alaska en 1859.


En 1855, le Smithsonian Institution Building fait désormais partie du gouvernement fédéral et la majorité de son personnel est fonctionnaire. En cas de procédure, elle est représentée par des mandataires du département de la Justice et les condamnations financières relèvent du trésor fédéral. Devenue organisation gouvernementale, l’institution est considérée légalement par les cours de justice comme partie du gouvernement des États-Unis. Son responsable officiel est le président de la Cour Suprême qui a le titre de  « chancelier ». Les affaires courantes sont gérées par un collège composé de personnalités officielles des États-Unis et de membres élus par le Congrès.


Sous la poussée de la recherche, des théories deviennent caduques. Les adeptes de la phrénologie estiment que la forme du crâne détermine la personnalité de quelqu’un. D’autres défendent la supériorité de certaines populations par rapport à d’autres, cautionnant ainsi la colonisation.


Une époque de progrès

L’essor scientifique observé sous le Second Empire ne doit rien au hasard et à la nécessité. Il repose sur des chercheurs pluridisciplinaires et une économie qui attend beaucoup d’eux en termes de recherches et d’applications.

Il participe d’un mouvement global soucieux de répondre aux besoins de sécurité, de gestion de la seconde révolution industrielle, de connaissances de l’ailleurs (grandes expéditions), de partage et de critique des informations et des théories disponibles ; d’amélioration du quotidien (premiers pas de la météo moderne, pasteurisation, lutte contre les maladies méconnues), de communication (télégraphe).


Une soif d’apprendre, de savoir et de comprendre par l’expérimentation se fait jour. Tout s’y prête dans une société encore à forte composante agricole qui évolue vers une société industrielle où le progrès technique ne fait plus tout à fait peur puisqu’il parvient progressivement à éradiquer des épidémies et des maladies rares vécues naguère comme des fatalités.

C’est tout le génie de Napoléon III d’avoir compris et accompagné ce vent de modernité pas toujours admis par ses bénéficiaires.

Durant ce processus de régulation, l’organisme maintient les différentes constantes du milieu intérieur (ensemble des liquides de l’organisme) entre les limites des valeurs normales. Son ouvrage majeur intitulé Introduction à l’étude de la médecine fait des adeptes chez les écrivains (Balzac et Zola), admirateurs de ses travaux.

Bibliographie


Édouard Vasseur, L’exposition universelle de 1867, Perrin, 2023. I Étienne Ghiss, secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, conférence « Napoléon Bonaparte et la science ».


Napoléon III-Pasteur, une amitié impériale efficiente

Sans les qualifier de fusionnelles, les relations de Louis Pasteur avec le couple impérial sont déterminantes pour la carrière et les recherches du scientifique. Une admiration réciproque qui n’empêche pas l’instauration d’un dialogue de vérité, entamé au sujet de la « misère des labos ». Le responsable de la maison natale de Pasteur à Dole a répondu à nos questions.


L’amitié entre Napoléon III et Pasteur s’est caractérisée par un échange fourni de correspondances. Qu’en reste-t-il ?

Les archives de Dole ont numérisé quelques copies de lettres de Pasteur écrivant à Napoléon III. Elles sont conservées à présent à la maison d’Arbois. De plus, Pasteur avait souvent des contacts avec l’entourage direct de l’Empereur, soit pour l’informer de ses travaux et découvertes concernant le vin, les maladies du ver à soie ou déplorer l’abandon des « savants » par le pouvoir ou l’arrêt des travaux d’aménagement de son laboratoire à L’ENS rue d’Ulm du fait de son AVC survenu en octobre 1868.


Comment qualifier cette amitié impériale ?

En 1863, suite aux interventions de Pasteur auprès du colonel Favé, aide de camp de l’Empereur, Napoléon III demande à Pasteur de faire des recherches sur les maladies du vin, que Pasteur avait déjà projetées en 1861. Deux ans après, les « Journées des découvreurs » au château de Compiègne, du 29 novembre au 6 décembre 1863 rassemblent artistes et scientifiques. Louis Pasteur s’y trouvait et ses courriers quasi quotidiens à son épouse nous renseignent sur le déroulement de ces rencontres. Il expose à l’Empereur, l’état de ses travaux sur les maladies du vin. Pasteur parvient à conquérir l’estime de l’Impératrice Eugénie, à laquelle il consacra de longues heures d’observations au microscope, en particulier sur des vins de la cave même du château, dont certains étaient victimes des « maladies » décrites par Pasteur. C’est après les premières investigations de Pasteur sur les maladies des vers à soie que Pasteur séjourne à Alès et produit Premières observations sur la maladie des vers à soie à la séance de l’Académie des sciences du 25 septembre. Cette confiance amicale et officielle sublime la productivité de Pasteur. Date après date, il est possible de reconstituer l’œuvre prolifique de Pasteur. En 1866, il publie l’ouvrage Études sur le vin dédié à Napoléon III et… à l’Impératrice. Le 5 septembre 1867, il fait le point dans une lettre à Napoléon III de l’état de ses travaux dans le Gard. En 1868, le projet de publication de son « Budget de la science » dans le Moniteur Universel (A), dénonce la misère des laboratoires du fait du manque de soutien et de crédits pour les « savants » fait grand bruit. Se jouant de la censure de la presse, l’audace de Pasteur est à souligner. Des négociations avec l’Empereur et ses proches ont lieu pour éviter cette publication et un laboratoire sera construit pour ses travaux à l’École Normale. Pasteur, tenace, publiera son réquisitoire à compte d’auteur chez Gauthier-Villars. Outré par l’arrêt des travaux après son AVC, il s’en plaint aux proches de Napoléon III ; celui-ci se dit offusqué et ordonne la reprise des travaux. En 1869, il séjourne en « convalescence » en famille à la villa Vincentina, propriété impériale située dans le Frioul, mise à la disposition de Pasteur par l’Empereur Napoléon III. Un élevage de vers à soie y est pratiqué, bien mal en point à l’arrivée de Pasteur. En 1870, Pasteur est nommé par décret sénateur par l’Empereur, un texte qui ne sera jamais promulgué en raison de la guerre et du changement de régime politique qu’elle entraîne.


Louis Pasteur a- t-il été victime de cette amitié sous la République compte tenu des faveurs napoléoniennes dont il avait bénéficiées ?

Ses travaux étaient reconnus par les cercles scientifiques et en haut lieu. Sa famille était réputée antiroyaliste : après la chute de la monarchie de juillet, n’avait-il pas déposé ses économies sur l’autel de la République en 1848, souhaitant s’engager comme garde national ? La République ne se montre d’ailleurs pas avare envers lui. En 1874, une récompense nationale, sous forme de rente viagère de 12 000 F, est attribuée à Pasteur par un vote à l’Assemblée nationale. Elle sera portée à 25 000 F en 1883. Deux ans après, Pasteur présente sa candidature à la campagne sénatoriale à Lons-le-Saunier (Jura). Il subit un échec cuisant 62 voix sur 1 289 ! Ses rapports avec les premiers présidents de la République après 1870 ne sont pas des meilleurs : Thiers est orléaniste, Mac Mahon légitimiste, et le républicain Jules Grévy, jurassien, a soutenu les candidats opposés à Pasteur aux sénatoriales de 1876 ! L’élection de Sadi Carnot, fin 1887, modifie favorablement les relations avec Pasteur. Celui-ci sera présent à l’inauguration de l’Institut Pasteur et Louis Pae comme à la célébration de son jubilé (ses soixante-dix ans) le 27 décembre 1892 dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne.


Louis Pasteur semble avoir bénéficié plus que d’autres scientifiques de son époque des largesses de l’Empereur. Pourquoi ?

Les travaux de Louis Pasteur ont été mis en avant par l’intermédiaire de Jean-Baptiste Dumas, le ministre Victor Duruy, le général Favé, le maréchal Vaillant… Ces appuis furent des relais très efficaces auprès de l’Empereur et l’amitié que lui accorda l’Impératrice fut un soutien indéniable. Son énergie et la variété de ses travaux et découvertes n’ont cessé d’étonner le pouvoir politique, ainsi que leurs retombées sur l’économie nationale, encore plus nombreuses pour le redressement de la France après la défaite de 1871.


Journal officiel de l’Empire français en 1852.


Un New-Yorkais, père de la météo moderne

Premier secrétaire de l’institution Smithsonian de 1846 à 1878, Joseph Henry (1787-1878) est un physicien américain auquel on doit l’auto-induction et l’induction électromagnétique des courants induits. Ses travaux améliorent l’électroaimant (A), déjà inventé en 1824. En 1831, il fabriqua le premier télégraphe électromagnétique. Henry conçut et construisit l’un des premiers moteurs électriques… Mais c’est dans le domaine météorologique qu’il va apporter des innovations qui feront date. En 1847, il crée un système d’observations météorologiques dont les bulletins télégraphiques du pays sont gérés à l’institut par une analyse quotidienne des informations recueillies. Une grande carte est établie et un bulletin est adressé au Washington Evening Post. Il effectua de nombreux travaux sur l’électromagnétisme (B) et a découvert le courant de rupture.



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